Thème : œuvrer pour la paix et la stabilité afin de favoriser l’industrialisation, le commerce et le travail décent pour la justice sociale
1. Introduction
Chaque année, le 1er mai, les travailleurs du monde entier se rassemblent en solidarité pour célébrer la Journée internationale des travailleurs, une occasion de rendre hommage aux luttes historiques et aux réalisations du mouvement syndical. Ancrée dans la revendication de la journée de huit heures, cette commémoration reste un puissant rappel de la quête permanente pour des salaires équitables, des conditions de travail sûres et la justice sociale.
Cette année, la CSI-Afrique commémorera cette journée autour du thème « Industrialisation, commerce et travail décent pour la justice sociale ». Ce thème met en lumière l’urgence de mobiliser l’industrialisation et le commerce comme moteurs de transformation, afin de créer des emplois décents, de stimuler une croissance économique durable et de promouvoir l’équité ainsi que la dignité des travailleurs africains.
2. Contexte et justification
L’Afrique se trouve à un tournant décisif de son développement économique. Malgré ses immenses ressources naturelles et humaines, le continent continue de faire face à des conflits violents persistants, un taux de chômage élevé, des marchés du travail informels, des conditions de travail précaires et des inégalités de revenus grandissantes. Dans les années 1970, l’Afrique postindépendance progressait graduellement vers l’industrialisation. Cependant, l’imposition des programmes d’ajustement structurel (PAS) a interrompu cette dynamique, annulant de nombreux acquis. Aujourd’hui, le continent est confronté à des menaces évitables de conflits violents qui entravent son développement. Il est donc essentiel de continuer à faire entendre nos voix, à plaider en faveur de la paix et à œuvrer pour faire taire les armes sur l’ensemble du continent africain.
L’industrialisation a le potentiel d’être un puissant moteur de création d’emplois et de réduction de la pauvreté, à condition qu’elle soit inclusive, respectueuse de l’environnement et appuyée par de solides mesures de protection des travailleurs. Toutefois, de nombreux pays africains restent piégés dans des modèles économiques extractifs qui ne génèrent pas suffisamment d’emplois à forte valeur ajoutée. Pour assurer une prospérité durable et une répartition équitable des richesses, un passage délibéré vers des économies diversifiées et résilientes est essentiel.
Parallèlement, l’essor de la quatrième révolution industrielle et la transition mondiale vers la décarbonisation représentent à la fois des défis et des opportunités pour les économies africaines. Sans un cadre structuré pour une transition juste, les travailleurs, en particulier ceux des industries traditionnelles, risquent d’être marginalisés. Les syndicats doivent jouer un rôle proactif afin de garantir que la transformation industrielle ne creuse pas les inégalités et ne fragilise pas les droits des travailleurs.
De même, la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) représente une opportunité majeure pour renforcer le commerce intra-africain et stimuler la croissance industrielle. Nous plaidons constamment en faveur d’engagements fermes concernant la facilitation du commerce, notamment en matière d’infrastructures de connectivité routière, maritime et aérienne, de systèmes de paiement efficaces, de régimes tarifaires harmonisés, d’ouverture plus importante des visas et de développement des compétences. Cependant, pour que les travailleurs et la population en général bénéficient réellement de ces accords, ceux-ci doivent inclure de solides mesures de protection des droits des travailleurs, des dispositifs de protection sociale et des mécanismes de participation démocratique. Malgré les complexités et les risques associés à la libéralisation commerciale à grande échelle, les travailleurs sont largement marginalisés dans les négociations de la ZLECAf. Les syndicats doivent de toute urgence militer pour leur inclusion dans les dialogues politiques afin de veiller à ce que le commerce favorise le travail décent plutôt que l’exploitation.
La croissance économique, aussi impressionnante soit-elle, doit se traduire par des améliorations concrètes dans la vie des travailleurs. Cela implique des salaires équitables, des conditions de travail sûres, une protection sociale et des opportunités égales pour tous, en particulier pour les femmes, les jeunes et les travailleurs du secteur informel.
La CSI-Afrique appelle donc tous ses affiliés, les syndicats et les travailleurs à faire du 1er mai 2025 une plateforme de mobilisation, de plaidoyer et d’action. Une transformation économique juste et inclusive, dans un environnement pacifique et stable, n’est pas seulement possible, elle est essentielle.
3 Messages clés pour les affiliés et les syndicats
Pour faire progresser les objectifs d’industrialisation, de commerce et de travail décent pour la justice sociale, les syndicats doivent :
appeler à un cadre national et continental solide pour la paix et la sécurité, centré sur le bien-être et la dignité humaine ;
demander la fin de toutes les formes d’agression violente et de promouvoir le dialogue ainsi que des solutions négociées, tout en manifestant solidarité et soutien aux pays, aux communautés et aux populations touchées par les conflits en cours sur le continent ;
plaider en faveur de politiques nationales d’industrialisation qui privilégient la création d’emplois, des salaires équitables et une protection sociale.
veiller à ce que les accords commerciaux, notamment la ZLECAf, intègrent de solides mesures de protection des droits des travailleurs et des dispositions garantissant le travail décent.
renforcer les mouvements syndicaux afin d’organiser les travailleurs de l’économie informelle, de l’économie des petits boulots et des plateformes numériques, et veiller à ce qu’ils ne soient pas exclus de la transformation industrielle de l’Afrique.
promouvoir une industrialisation durable en accord avec la justice climatique, des salaires justes et les droits des travailleurs.
demander une transition juste qui garantisse la protection des travailleurs des secteurs touchés par l’automatisation et l’adaptation au changement climatique.
4. Propositions d’actions pour la commémoration du 1er mai 2025
Au niveau national :
Organiser des rassemblements, des marches et des conférences pour sensibiliser à ce thème.
Faire pression sur les gouvernements afin qu’ils adoptent des politiques d’industrialisation et de commerce favorables aux travailleurs.
Dialoguer avec les employeurs pour négocier des conventions collectives garantissant les principes du travail décent.
Lancer des campagnes médiatiques afin de renforcer la visibilité des revendications des travailleurs en matière de justice économique et sociale.
Au niveau des lieux de travail :
Organiser des forums pour sensibiliser les travailleurs à l’industrialisation, au commerce et à leurs droits.
Renforcer la syndicalisation et les efforts de négociation collective.
Plaider en faveur d’une amélioration des normes de santé et de sécurité au travail, en particulier dans les secteurs industriels et à haut risque.
Au niveau communautaire :
Collaborer avec les organisations de la société civile pour promouvoir des politiques économiques équitables.
Organiser des sessions de formation sur les droits des travailleurs, le commerce et les politiques industrielles.
Encourager la participation des jeunes et des femmes aux instances dirigeantes des syndicats et aux processus de prise de décision.
5. Conclusion :
L’avenir de l’Afrique dépend de l’industrialisation équitable, du commerce juste et d’un engagement fort en faveur du travail décent. Sans la participation active des syndicats et des travailleurs, les politiques industrielles risquent de servir les intérêts des entreprises et des élites politiques plutôt que ceux du peuple.
En ce1er mai, la CSI-Afrique appelle tous les travailleurs et alliés à se rassembler et à exiger une transformation économique juste, une transformation qui place les personnes avant les profits, la dignité avant l’exploitation et la solidarité avant l’exclusion. Bâtissons un avenir où l’industrialisation et le commerce sont véritablement des moteurs de la justice sociale, et non de l’inégalité.
Le Secrétaire Général
Akhator Joel ODIGIE