Nous, syndicats africains, organisés dans le cadre de l’Organisation Régionale Africaine de la Confédération Syndicale Internationale (CSI-Afrique), faisons depuis l’année dernière un suivi critique des preuves scientifiques relatives à la crise climatique ;
Nous avons constaté que les preuves de l’urgence climatique imminente s’accumulent, comme le souligne le rapport 2021 du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ;
et que les menaces qui pèsent sur l’Afrique sont encore plus inquiétantes alors que ce continent a le moins contribué à la crise climatique ;
Conscients de l’ampleur des dévastations socio-économiques causées par la pandémie de COVID 19 en Afrique et reconnaissant combien il est urgent d’accélérer la relance tout en s’attaquant aux inégalités et autres injustices ;
Convaincus que l’Accord de Paris offre un cadre privilégié de collaboration entre toutes les parties et tous les acteurs de toutes les juridictions en vue de lutter contre le changement climatique et d’éviter la crise imminente ;
Les syndicats africains demandent sans équivoque de :
Relever les niveaux d’ambitions et les soutenir par des actions concrètes à tous les niveaux : Nous demandons à toutes les parties de faire preuve de plus d’ambition en ce qui concerne les niveaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre et le temps imparti. Nous nous engageons à soutenir fermement les efforts visant à contenir le réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius, tout en sachant que cela implique des mesures drastiques pour réaliser de nets progrès à l’horizon 2030, conformément à l’ODD 13. Nous demandons également que les pays industrialisés riches, historiquement responsables de la plus grande partie de l’accumulation des gaz à effet de serre, tiennent leurs promesses de manière transparente afin que nous puissions éliminer tout empreinte de carbone d’ici 2050.
Engagements contraignants en matière d’atténuation :
Nous soutenons les obligations contraignantes de tous les pays à contribuer à la réduction des émissions et l’institution de mesures dans le cadre des Contributions déterminées au niveau national (CDN). Nous saluons en même temps les efforts des
pays africains à cet égard et attendons d’eux qu’ils fassent preuve de relever davantage leurs niveaux d’ambition tous les cinq ans pour parvenir à un équilibre entre les émissions anthropiques par les sources et leur absorption par les puits dans la seconde moitié du siècle. De plus, nous demandons aux pays riches industrialisés de répondre aux préoccupations légitimes de la conditionnalité de la mise en oeuvre de toutes les mesures des CDN des pays africains.
Transition juste :
Le mouvement syndical africain est conscient de la nécessité impérieuse et historique de parvenir à des sociétés à zéro émission de carbone. La crise climatique a déjà des répercussions directes sur les travailleurs et les communautés vulnérables africains. Par conséquent, il serait injuste que des mesures de lutte contre le réchauffement climatique ne tiennent pas compte des inégalités et des injustices. La meilleure façon pour les sociétés de mettre en place une économie décarbonée est de s’assurer que le processus de transition est juste ! Les travailleuses et les travailleurs, ainsi que les autres catégories vulnérables de la société, ne devraient pas supporter plus que leur juste part des charges sur la voie du net-zéro. Nous demandons une transition juste vers des économies à faibles émissions de gaz à effet de serre et des sociétés résilientes au changement climatique en Afrique. La quête d’une transition juste est fondée sur le respect du droit de l’Afrique au développement et à l’industrialisation. Elle s’impose d’autant plus que l’on cherche à réduire les inégalités et les injustices flagrantes que la pandémie a révélées.
Les règles de mise en oeuvre en cours de négociation à la COP 26 doivent s’efforcer de répondre de manière appropriée à cette demande.
Financement climatique en faveur de l’atténuation et de l’adaptation
Le financement de la lutte contre le changement climatique est devenu une question plus pressante compte tenu des contraintes budgétaires que connaissent les pays africains face à la pandémie et à la crise climatique qui se profile à l’horizon. Les pays développés n’ont pas encore tenu leur promesse de verser cent milliards de dollars chaque année dans la période allant de 2010 à 2020. Le fait de ne pas tenir la promesse est sans aucun doute un problème sérieux, parce que la promesse a servi de base aux négociations de Paris et qu’il est nécessaire de la tenir si l’on veut que les pays en développement respectent leurs engagements. Le financement climatique est non seulement essentiel pour les obligations directes d’atténuation prévues par les CDN, mais aussi pour les mesures d’adaptation urgentes visant à réduire les dégâts subis par les communautés africaines en termes de moyens de subsistance, d’emploi et d’infrastructures. Les pertes et les dommages se sont déjà produits, et le financement climatique est nécessaire pour une action immédiate.
Pertes et dommages
Le changement climatique a entraîné des pertes et des dommages de toutes sortes au fil des ans, mais leur fréquence et leur intensité ont augmenté pendant la dernière décennie, plus particulièrement sur le continent africain. Nous demandons donc une réponse sérieuse à cette préoccupation. Nous espérons que la COP 26 se penchera sur les mécanismes pertinents de Varsovie pour démontrer son engagement dans la poursuite d’une économie sans carbone. Par ailleurs, il est également nécessaire d’avoir des mécanismes clairs permettant de gérer les pertes et les dommages en vue d’endiguer la désintégration des systèmes de subsistance agricoles et ruraux. La nécessité pressante de protéger et de régénérer les ressources naturelles favorisera en outre la mise en place de mécanismes clairs de compensation des pertes et des dommages résultant de la crise climatique.
Partenariats multipartites
L’ampleur du changement climatique requiert des actions concertées et une collaboration de tous les pays et de toutes les parties prenantes au niveau national. Il faudrait consentir des sérieux efforts pour finaliser le règlement de Paris visant à fixer les règles dont nous avons besoin pour la mise en oeuvre de l’accord de Paris et faire la place voulue à une collaboration intensive de tous les gouvernements, toutes les entreprises, tous les syndicats et toute la société civile. Des partenariats multipartites se développeront si la COP 26 est guidée par l’article 12 de l’Accord de Paris, qui prévoit catégoriquement l’éducation, la sensibilisation, la formation, la sensibilisation du public, la participation du public et l’accès du public à l’information, et crée les conditions pour le renforcement du dialogue social.
Signé : Kwasi Adu-Amankwah
Organisation Régionale Africaine de la Confédération Syndicale Internationale – CSI-Afrique
Lomé- Togo
Le 29 octobre 2021